Le tatouage en Tunisie : des Amazighes à la nouvelle génération
Depuis l'Antiquité, les gens maîtrisent l'art de dessiner sur le corps avec différentes expressions et à des fins diverses. Le tatouage est l'une des plus anciennes de ces pratiques, telle qu'elle est apparue dans diverses civilisations à travers l'histoire.
En Tunisie, les tatouages sont apparus avec les Amazighes, le peuple indigène du pays, car il est considéré comme un héritage ancien et profondément enraciné dans la culture Amazighe et faisant partie de son identité.
En langue amazighe, on l'appelle "Tikaz", et il était principalement associé aux femmes et dans une moindre mesure aux hommes.La majorité des femmes amazighes ont des tatouages.
Les tatouages prennent une dimension esthétique pour les Berbères et sont considérés comme l'un des moyens de parure les plus importants pour les femmes tout au long de leur vie.Ils sont tatoués à l'âge de la puberté pour annoncer par des formes, des symboles et des dessins leur entrée dans l'étape de la maturité. Et elle met des tatouages dans diverses zones de son corps, comme le visage, le bras, la main, la poitrine, les seins, les jambes et les zones sensibles de son corps, de sorte qu'il se transforme en une peinture qui s'adresse à l'autre pour l'impressionner. Ainsi le tatouage devient une connotation séduisante esthétique.
Quant aux hommes, ils se contentent de quelques tatouages sur la main, le bras et les jambes.
Les dessins qui remplissent le corps de la fille ne sont pas absurdes et chaque symbole a sa propre signification.
L'un des dessins les plus importants répandus parmi la majorité des femmes amazighes est le signe plus (+), qui est dessiné sur la joue et signifie la lettre Ta dans les lettres amazighes, qui est une abréviation du mot "tamtout", qui signifie la belle femme ou la belle femme élégante.
La signification des symboles diffère également selon leur position dans le corps : ceux dessinés sur les seins, par exemple, ont des connotations de fertilité.
Les Berbères pratiquaient également le tatouage à des fins médicales, car ils croyaient qu'il guérissait les maladies, demandait la fertilité des stériles, éloignait l'envie et le mauvais œil et protégeait contre les épidémies.
Ils avaient l'habitude de tatouer un point à côté du nez pour se protéger contre les maladies dentaires, ou à côté de l'œil pour prévenir les maladies affectant les yeux.
Les tatouages ont également des fonctions métaphysiques, et on croyait qu'ils éloignaient les mauvais esprits, annulaient la sorcellerie et conjuraient la pauvreté et la misère, grâce à des dessins et des symboles placés avec une extrême précision.
Parmi les symboles les plus utilisés figurent l'abeille, l'escargot, le serpent, les épis de blé, le soleil, le scorpion, les étoiles, le rameau d'olivier et d'autres symboles porteurs de nombreuses significations dont certaines symbolisent l'emplacement de chaque tribu Amazighe.
Le tatouage a transformé le corps humain amazigh en une peinture d'art lisible riche en symboles et en dessins, racontant aux générations suivantes les caractéristiques de cette civilisation et reflétant la valeur et le système culturel de ces sociétés.
Avec l'avènement de l'islam et sa diffusion dans le pays et l'adoption par les Amazighs, cette pratique n'a pas été abandonnée malgré les hadiths prophétiques interdisant le tatouage, mais elle s'est plutôt répandue, notamment dans les sociétés tribales, bédouines et rurales, et elle a été héritée par générations jusqu'à l'indépendance (milieu du XXe siècle), lorsque les tatouages auraient des connotations différentes.
Avec les années soixante du siècle dernier et l'état moderne, les tatouages avaient des objectifs complètement différents et ont commencé à perdre leur caractère d'origine et à ne plus porter leurs connotations d'origine. C'est devenu une honte pour les femmes de se faire tatouer, et cela n'est associé qu'aux hommes, et au sens populaire de délinquants ou de chômeurs.
Les dessins et leurs emplacements ont changé, et le visage n'est plus un espace pour eux, et ils sont principalement placés sur le cou, le bras, l'épaule et les jambes.
Les tatouages n'ont plus de lien collectif, et chaque dessin ou symbole a une signification qui n'appartient qu'à son propriétaire. Des dessins et des symboles de pouvoir se sont répandus, tels que des images d'aigle, de scorpion, de dragon et de serpent, en plus de la première lettre du nom d'une personne ou du nom d'un être cher.
Les prisons, à leur tour, ont incubé les tatouages de manière secrète, car des outils tranchants sont introduits illégalement ou fabriqués en prison, et de l'encre sèche est utilisée.
Il est à noter que la majorité des dessins tatoués en prison sont des dessins qui portent le sens de la liberté et de la vie, comme la bougie, l'ancre et le soleil.
Avec le nouveau millénaire, et avec ce qu'on appelle les fils de la nouvelle génération, les tatouages ont commencé à perdre leurs caractéristiques traditionnelles, leurs moyens premiers et leurs identités anthropologiques, affectées par des variables techniques. Mais il est revenu pour inclure à la fois les hommes et les femmes, comme il a commencé avec les Amazighes, et tous les groupes d'âge. Et c'est devenu un phénomène dans la rue tunisienne.
Et tandis que les Amazighes et les derniers qui ont hérité de cette habitude, notamment dans les communautés rurales, utilisaient la couleur verte et dans une moindre mesure la couleur noire (le noir était utilisé pour éloigner la magie et les mauvais esprits selon les croyances), alors les corps des la nouvelle génération est devenue de toutes les couleurs.
La diffusion des tatouages dans ses nouvelles voies est due à la propagation des boutiques spécialisées dans ce domaine, qui sont devenues attrayantes pour beaucoup, surtout pendant la saison estivale, ce qui représente une occasion de montrer ces décorations et de les rendre visibles.
Quant aux raisons de la demande de tatouages, elles sont nombreuses et diffèrent d'un jeune homme à l'autre.Les jeunes d'aujourd'hui recherchent une différence d'apparence, loin de l'ordinaire.
L'imitation joue également un rôle majeur à cet égard, car les jeunes imitent les célébrités, y compris les artistes, les acteurs et les athlètes, même dans leur mode de vie. La mondialisation, avec ses divers moyens, a également joué un rôle important dans sa propagation.
Au mois de Ramadan 2015, une chaîne privée tunisienne a diffusé une série tunisienne dont le héros porte un tatouage s'étendant du haut du bras à l'épaule.
Le tatouage est devenu le symbole des "Enfants de Mofida", le titre de la série, que certains considéraient comme l'incarnation de la vie d'un grand groupe de jeunes tunisiens.
Source : sites Internet