L’atlas génétique des Européens du Paléolithique révélé
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Le séquençage partiel du génome de 356 chasseurs-cueilleurs sapiens européens confirme certains chapitres du Paléolithique supérieur et en révèle de nouveaux, jusque-là inconnus.
L’atlas génétique de l’Europe paléolithique se précise. L’équipe de Johannes Krause, de l’institut Max-Planck pour l’anthropologie évolutive à Leipzig, a rassemblé le séquençage de 1,24 million de sites de l’ADN de 356 chasseurs-cueilleurs sapiens provenant de plusieurs dizaines sites paléolithiques européens occupés au cours des 35 000 dernières années. Après avoir comparé ces profils, les chercheurs ont défini plusieurs bassins génétiques – les groupes de « Věstonice », « Fournol », etc. –, qu’ils ont reliés aux cultures matérielles pratiquées par leurs membres.
Les données des chercheurs ne concernent pas la première culture matérielle paneuropéenne – l’Aurignacien –, mais montrent que celle du Gravettien (- 33 000 à - 26 000 ans), qui lui succède était pratiquée non pas par une seule, mais par deux populations, qui se partageaient l’Europe avant le dernier maximum glaciaire (de - 26 000 à - 19 000 ans) : le groupe de Věstonice (d’après les sites proches de ce village Tchèque), qui peuplait les territoires actuels de l’Italie, la République tchèque et l’Autriche ; et le groupe de Fournol (d’après l’abri de Fournol, dans le Lot), répandue dans le sud-ouest de l’Europe (France et Espagne). Tandis que les premiers descendaient de chasseurs-cueilleurs plus anciens vivant à l’est (Russie), les seconds sont apparentés à des Aurignaciens, qui vivaient dans la région de la grotte belge de Goyet il y a 35 000 ans.
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Au cours du dernier maximum glaciaire, les populations humaines se sont réfugiées au sud : à l’ouest du Rhône et dans la péninsule Ibérique, Fournol a développé la culture matérielle du Solutréen (- 23 000 à - 19 000 ans) ; à l’est, la tradition gravettienne a persisté jusqu’à ce que, il y a environ 17 000 ans, des groupes en provenance du Proche-Orient arrivent en Italie, y fondant le groupe nommé Villabruna (d’après la sépulture de l’abri Villabruna, dans les Dolomites). Progressant vers le sud, la culture matérielle épigravettienne (- 17 000 à - 10 000 ans) pratiquée par les membres du groupe Villabruna a atteint la Sicile il y a environ 14 000 ans, mais s’est aussi étendue au-delà de l’Italie, puisque les chercheurs ont trouvé des preuves d’ascendance Villabruna chez un individu mort il y a 19 000 ans à El Mirón, en Espagne. Nous apprenons ainsi que la culture matérielle épigravettienne, que l’on pensait issue du Gravettien oriental, est importée, et aussi que les hommes du Paléolithique ont circulé après le dernier maximum glaciaire dans un corridor méridional reliant les Balkans et la péninsule ibérique.
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Les auteurs ont analysé les données génomiques de 116 nouveaux individus et réanalysé les données déjà publiées pour 240 autres. Ces 356 individus proviennent de 34 pays.
Nature
Les généticiens ont aussi montré qu’après le dernier maximum glaciaire, les populations réfugiées au sud se sont redéployées vers le nord, en mélangeant les gènes des groupes Villabruna et Fournol. En France, en Belgique, en Allemagne et en Pologne actuelles, ces groupes ont donné la population étiquetée par les chercheurs « Goyet Q2 », associée à la culture matérielle magdalénienne, connue pour son art pariétal à couper le souffle. Il y a 14 000 ans environ, la fusion complète entre Villabruna et Goyet Q2 a donné le groupe Oberkassel, qui semble avoir été homogène de la Pologne au Royaume-Uni. Nous lui devons la composante génétique issue des chasseurs-cueilleurs occidentaux toujours visible dans les gènes des populations actuelles de l’Europe de l’Ouest.
Plus à l’Est, c’est une autre population, dont les membres avaient une peau plus claire que ceux d’Oberkassel et des yeux sombres, que l’on retrouve : la population Sidelkino. Elle a fini par développer la culture Sidelkino en Russie occidentale, tandis que des incursions d’individus génétiquement issus du groupe Oberkassel ont commencé à atteindre la région du Don et de la Volga, en Russie, il y a 8 000 ans.

Enfin, même si la démographie des agriculteurs qui sont arrivés en Europe depuis l’Anatolie était plus dynamique que celle des chasseurs-cueilleurs locaux, les chercheurs ont constaté que des individus dotés d’une ascendance principalement Oberkassel ont persisté en Allemagne jusqu’à il y a environ 5 200 ans, en plein Néolithique – un phénomène déjà remarqué au nord de la France. Cela suggère que pendant la transition néolithique, certains chasseurs-cueilleurs occidentaux n’ont pas disparu mais ont adopté le mode de vie agricole, si bien que nous avons pu hériter de certains de leurs gènes.


Source : sites Internet