Un "monde perdu" : des scientifiques découvrent la trace de nos ancêtres qui ont vécu il y a 1,64 milliard d'années
Un "monde perdu" : des scientifiques découvrent la trace de nos ancêtres qui ont vécu il y a 1,64 milliard d'années 1-1498
Tous les animaux – y compris les humains – mais aussi les champignons et les plantes, entre autres, partagent une caractéristique commune : le fait de posséder des cellules dotées d'un noyau. Ce qui nous place parmi les êtres vivants dits "eucaryotes". Des scientifiques ont découvert une trace moléculaire de nos lointains ancêtres, dans des roches vieilles de plus d'un milliard et demi d'années.
Et si les stéroïdes représentaient la clé pour retracer notre histoire évolutive ? Cette famille de molécules vous évoque peut-être le culturisme, ou le dopage de certains sportifs de haut niveau. Pourtant, de tels usages concernent uniquement une catégorie particulière, celle des anabolisants – pour faire simple, des versions synthétiques de la testostérone qui développent les muscles.
Un "monde perdu" : des scientifiques découvrent la trace de nos ancêtres qui ont vécu il y a 1,64 milliard d'années 12049
En réalité, les stéroïdes au sens large, ou plus exactement les "stérols", regroupent par exemple le cholestérol et le phytostérol qui composent les membranes des cellules eucaryotes (dotées d'un noyau), la vitamine D qui renforce notre squelette et nos articulations, ou encore les acides biliaires essentiels pour la digestion.
Dans des roches australiennes qui correspondent à un écosystème marin daté d'il y a 1,64 milliard d'années, des scientifiques ont découvert un nouveau type de stérols, appelés "protostérols". Leur présence témoigne de l'existence d'une "vie complexe" à cette période, expliquent-ils dans un article publié par la revue Nature le 7 juin (Brocks, J.J., Nettersheim, B.J., Adam, P. et al. 2023).
EN IMAGES Microphotographie : les plus belles photos du Concours Nikon Small World
Ainsi, les ancêtres communs des animaux, des champignons et des plantes, entre autres, peuplaient déjà notre planète plus d'un milliard et demi d'années avant notre ère. Pour trouver les toutes premières formes de vie – à l'origine des eucaryotes mais aussi des bactéries et des archées dépourvues de noyau cellulaire – il faut toutefois remonter encore plus loin, il y a quelque 3,8 milliards d'années.
Un "monde perdu" : des scientifiques découvrent la trace de nos ancêtres qui ont vécu il y a 1,64 milliard d'années 1--699
L'idée d'un lauréat du prix Nobel
Trouver des fossiles âgés de plus d'un milliard d'années relève néanmoins de la gageure, car la préservation de ces formes de vie ancestrales jusqu'à nos jours nécessite des conditions particulières. C'est pourquoi l'équipe du Pr Jochen Brocks, chercheur à l'Université nationale australienne (ANU), a choisi une approche différente : celle de partir à la recherche de traces moléculaires.
Mais encore fallait-il savoir quoi chercher précisément. "Presque tous les eucaryotes synthétisent des stéroïdes, tels que le cholestérol produit par les humains et la plupart des autres animaux, explique le Pr Benjamin Nettersheim de l'université de Brême, co-auteur de l'étude, dans un communiqué. (...) En recherchant des stéroïdes fossilisés dans les roches anciennes, nous pouvons retracer l'évolution d'une vie de plus en plus complexe".
Un "monde perdu" : des scientifiques découvrent la trace de nos ancêtres qui ont vécu il y a 1,64 milliard d'années 1-353
Une idée qui ne vient pas de nulle part, puisqu'elle avait d'abord été émise dans les années 1990 par le biochimiste allemand Konrad Bloch – lauréat avec Feodor Lynen du prix Nobel de physiologie ou médecine de 1964 pour leurs découvertes sur les mécanismes et la régulation du cholestérol et le métabolisme des acides gras.
Les auteurs de l'étude ont donc commencé par comparer les stéroïdes actuels afin d'en déduire la structure chimique de potentiels équivalents fossiles. Puis, ils ont passé des roches au peigne fin – ou plutôt, au laser et au spectromètre de masse à haute résolution.
"Une fois que nous avons identifié notre cible, nous avons découvert que des dizaines d'autres roches, prélevées dans des cours d'eau vieux d'un milliard d'années à travers le monde, regorgeaient de molécules fossiles similaires", précise le Pr Brocks.

Oxygène et "Terre boule de glace"
Ces premières communautés complexes ont contribué, avec certaines bactéries (les cyanobactéries), à émettre de fortes quantités d'oxygène dans l'atmosphère, soulignent les auteurs de l'étude. Peu après, la Terre s'est presque entièrement recouverte de glace – un phénomène appelé "Terre boule de neige". La plupart de ces organismes ont alors disparu… sauf quelques-uns, probablement avantagés à travers la sélection naturelle par leur résistance au froid ou aux rayons UV. Nos ancêtres!


Source : sites Internet