“Khawa khawa” ou l’idéologie du vampirisme
“Khawa khawa”, ce slogan me dérange. Me gêne. Idéologiquement, il nous piège, nous tous. Il nous aveugle par sa façade fourbe. Par son hypocrisie politique moraliste, il nous ligote, en nous rendant comme des êtres sans langue, sans tête, sans rêve et sans projet. “Khawa khawa” est un piège, le pire des pièges politiques et culturels qu’a connus l’Algérie, qui se cherche depuis soixante ans !
Attention, “khawa khawa” n’est qu’un masque. Derrière cet intrigant masque se cache le visage d’un ogre idéologique. Derrière le rideau “khawa khawa” s’installe le démon déguisé en image d’un soi-disant “frère”. Armez-vous de vos vives mémoires, chers citoyens démocrates, citoyens libéraux. Armez vos mémoires ! La mémoire n’est pas un tamis ! L’oubli est un suicide. L’oubli est une traîtrise.
À l’ombre de “khawa khawa”, les bourreaux d’hier nous guettent en se faufilant dans l’image soyeuse d’un fleuriste ou d’un flûtiste ! Les vampires nocturnes d’hier marchent, en plein jour, aux côtés de leurs prochaines victimes en scandant “khawa khawa”. Ils aiguisent leurs couteaux et ajustent leurs mahchouchas ! Abdelkader Alloula nous regarde, blessé. Tahar Djaout nous fixe, choqué. Cheb Hasni se pleure dans une nouvelle mélodie. Azzedine Medjoubi s’exclame, offusqué. Smaïl Yefsah a perdu le mot. La jeune lycéenne Katia Bengana hurle et nous crache à la gueule, M’hamed Boukhobza, Djilali Liabès, Djilali Belkhenchir, Mahfoud Boucebci, Laâdi Flici, Youcef Sebti, Bakhti Benaouda, Abderrahmane Fardehab, Cheb Aziz… Saignants encore, nos morts se retournent dans leur tombe ! La plaie n’est pas fermée, les récits d’horreur ne sont pas effacés. Comme les sirènes de la porte d’enfer, “khawa khawa” réveille nos valeureux morts assassinés et endort nos réveillés !
Derrière ce masque de “khawa khawa”, leurs sabres sont prêts. Tirés de leurs étuis.
“Khawa khawa”, ce slogan me dégoûte. Derrière ce masque “khawa khawa”, les féminicides se préparent pour un lendemain masochiste et obsédé. La femme, “blaçatha” (sa place) est dans sa cuisine !
“Khawa khawa” est un prétexte idéologique afin d’étouffer toutes les différences fécondes. Toutes les richesses de la diversité. “Khawa khawa”, c’est une manière de noyer la société dans la culture du troupeau. Dans le faux respect, où se mélangent politique, morale et ruse !
“Khawa khawa, c’est tirer le débat vers la morale négative, vers la soumission domestique. Le silence complice. Implicitement, mais en pleine lumière, faire régner le paternalisme sanguin. La fratrie minée !
“Khawa khawa” est une ruse idéologique orchestrée par les islamistes, les restes de l’ancien parti dissous, dont le but est de laver le qamis souillé de sang. “Khawa khawa” est une idéologie du vampirisme qui vise les dupes, la populace, les petites gens dont le but est de les endoctriner par de nouveaux discours des anciens djihadistes qui cherchent à se refaire une nouvelle virginité politique. “Khawa khawa” est une rhétorique stérile dont les utilisateurs tentent le retour sur la scène politique. Un retour sur le dos des démocrates et des libéraux emportés par la colère contre un système politique corrompu. Quelle belle monture ! Scander “khawa khawa” dans les marches ou sur les écrans des chaînes de télévision, c’est se cacher derrière son doigt.
“Khawa khawa” est une sorte de réconciliation qui se fait en trichant l’Histoire, en mentant sur l’Histoire.
“Khawa khawa” est une sorte de bain maure, de sauna, pour ceux qui souhaitent revenir.
“Khawa khawa” n’est qu’un acte politique pour déterrer un mort qui refuse sa mort : un parti politique !
“Khawa khawa” est le chant d’un oiseau nécropole annonciateur de la saison du retour des vampires métamorphosés en vendeurs de lingerie, vente en gros et au détail !
“Khawa khawa”, c’est rêver de reprendre le chemin raté ou suspendu en 1991 du siècle dernier.
“Khawa khawa” est un signe du retour de la peur ! Les sangsues !
Dans “khawa khawa”, il n’y a ni frère ni fraternité ; sur le trottoir les loups guettent leur proie ! Qui sera-t-il Caïn l’égorgeur et qui sera-t-il Abel l’égorgé ? Et pourtant ils étaient nés “khawa khawa” !
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr