-1-Architecture Égyptienne Ancienne
les pyramides de gizeh
Les pyramides sont le symbole le plus reconnaissable de l'Égypte ancienne. Même alors que d'autres civilisations, comme les Mayas ou les Chinois, ont également utilisé cette forme, de nos jours, la pyramide est synonyme d’Égypte dans l'esprit de la plupart des gens. Les pyramides de Gizeh restent des monuments impressionnants des milliers d'années après leur construction. Les connaissances et les compétences nécessaires à leur construction furent accumulées au cours des nombreux siècles qui précédèrent leur construction. Pourtant, les pyramides ne sont pas l'apogée de l'architecture de l'Égypte ancienne; elles ne sont que les expressions les plus anciennes et les plus connues d'une culture qui allait créer des bâtiments, des monuments et des temples tout aussi fascinants.
6000 ans d'histoire
L'histoire de l'Égypte ancienne commence avant la période prédynastique (vers 6000 - 3150 av. JC) et elle se poursuit jusqu'à la fin de la dynastie ptolémaïque (323 - 30 av. JC). Des artefacts et des preuves de surpâturage du bétail, dans la région identifiée aujourd’hui comme faisant partie du désert du Sahara, donnent la date de l'occupation humaine du territoire à environ 8000 av. JC. Les Égyptiens du tout début de la période dynastique en Égypte (vers 3150 - 2613 av. JC) construisirent sur les connaissances de ceux qui les avaient précédés, et l'art et l'architecture prédynastiques furent améliorés. La première pyramide d'Égypte, la pyramide à degrés de Djéser à Saqqarah, date de la fin de cette période dynastique précoce. La comparaison de ce monument et de son complexe environnant avec les mastabas, les tombes des siècles précédents, montre à quel point les Égyptiens avaient progressé dans leur compréhension de la conception et de la construction architecturales. Le lien entre ces grands monuments et ceux qui leur ont succédé est tout aussi impressionnant.
Les pyramides de Gizeh datent de l'Ancien Empire (vers 2613 - 2181 av. JC) et elles représentent l'apogée du talent et des compétences acquises à cette époque. L'histoire de l'Égypte ancienne avait cependant encore un long et illustre chemin à parcourir et, à mesure que la forme pyramidale fut abandonnée, les Égyptiens concentrèrent leur attention sur les temples. Nombre d'entre eux, dont les ruines sont encore visibles, comme le temple d'Amon-Rê à Karnak, inspirent autant d'admiration que les pyramides de Gizeh, mais tous, qu'ils soient grands ou modestes, témoignent d'un souci du détail et d'une conscience de la beauté esthétique et de la fonctionnalité pratique qui en font des chefs-d'œuvre de l'architecture. Ces structures suscitent encore un intérêt aujourd'hui parce qu'elles furent conçues, dessinées et érigées pour raconter une histoire éternelle qu’elles relatent encore à tous ceux qui visitent les sites.
LES STRUCTURES ÉGYPTIENNES SUSCITENT ENCORE UN INTÉRÊT AUJOURD'HUI PARCE QU'ELLES FURENT CONÇUES, DESSINÉES ET ÉRIGÉES POUR RACONTER UNE HISTOIRE ÉTERNELLE QU’ELLES RELATENT ENCORE À TOUS CEUX QUI VISITENT LES SITES.
L'architecture égyptienne et la création du monde
Au début des temps, selon la religion égyptienne, il n'y avait rien d'autre que les eaux tourbillonnantes d'un sombre chaos. De ces eaux primordiales un monticule de terre sèche, appelé Benben, s’éleva, autour duquel les eaux grondaient. Le dieu Atoum apparut sur le monticule, il regarda l'obscurité et il se sentit seul; il s' accoupla donc avec lui-même et la création commença.
Atoum était responsable de l'univers inconnaissable, du ciel au-dessus et de la terre en-dessous. Par l'intermédiaire de ses enfants, il était également le créateur des êtres humains (bien que dans certaines versions, la déesse Neith joue un rôle à cet égard). Le monde et tout ce que les êtres humains connaissent est venu de l'eau, de l'humidité, de la moiteur, du type d'environnement familier aux Égyptiens du delta du Nil. Tout avait été créé par les dieux et ces dieux étaient toujours présents dans la vie de chacun à travers la nature.
Lorsque le Nil débordait de son lit et déposait le sol vivifiant dont les gens dépendaient pour leurs cultures, c'était l'œuvre du dieu Osiris. Lorsque le soleil se couchait le soir, c'était le dieu Rê (ou Râ) qui descendait dans le monde souterrain dans sa barge, et les gens participaient volontiers aux rituels pour s'assurer qu'il survivrait aux attaques de son ennemi juré Apophis et qu'il ressusciterait le lendemain matin. La déesse Hathor était présente dans les arbres, Bastet gardait les secrets des femmes et protégeait le foyer, Thot donnait aux gens le don de l'instruction, Isis, bien qu'étant une grande et puissante déesse, avait également été une mère célibataire qui avait élevé son jeune fils Horus dans les marais du Delta et elle veillait sur les mères sur terre.
Piliers Djed
La vie des dieux reflétait celle du peuple et les Égyptiens les honoraient dans leur vie et à travers leurs œuvres. On pensait que les dieux avaient offert au peuple de l'Égypte ancienne le plus parfait des mondes, si parfait, en fait, qu'il devait durer éternellement. La vie après la mort n'était que la continuation de la vie que l'on avait vécue. Il n'est donc pas surprenant que lorsque ces gens construisirent leurs grands monuments, ils aient reflété ce système de croyance. L'architecture de l'Égypte ancienne raconte l'histoire de la relation de ce peuple avec sa terre et ses dieux. La symétrie des structures, les inscriptions, la décoration intérieure, tout reflète le concept d'harmonie (Maât) qui était au cœur du système de valeurs de l'Égypte ancienne.
Les périodes prédynastique et dynastique précoce
Au cours de la période prédynastique en Égypte, des images des dieux et des déesses apparaissent dans les sculptures et les céramiques, mais le peuple ne possédait pas encore les compétences techniques nécessaires pour ériger des structures massives en l'honneur de ses dirigeants ou de ses divinités. Une certaine forme de gouvernement est évidente au cours de cette période, mais elle semble avoir été régionale et tribale, rien à voir avec le gouvernement central qui apparaîtra dans l'Ancien Empire d'Égypte.
Les maisons et les tombes de la période prédynastique étaient construites en briques crues séchées au soleil (une pratique qui se poursuivra tout au long de l'histoire de l'Égypte). Avant la découverte de la fabrication des briques, les maisons étaient des structures de roseaux couvertes de chaume et dont les murs étaient recouverts de boue. Ces premiers bâtiments étaient circulaires ou ovales avant l'utilisation des briques et, après, ils sont devenus carrés ou rectangulaires. Les communautés se regroupèrent pour se protéger des éléments, des animaux sauvages et des étrangers, et elles se développèrent en villes qui s'entourèrent de murs.
Au fur et à mesure que la civilisation progressa, l'architecture en fit de même avec l'apparition de fenêtres et de portes renforcées et décorées de cadres en bois. Le bois était plus abondant en Égypte à cette époque, mais pas encore en quantité suffisante pour être utilisé comme un matériau de construction à grande échelle. La maison ovale en briques crues devint la maison rectangulaire avec un toit voûté, un jardin et une cour. Le travail de la brique crue est également mis en évidence dans la construction des tombes qui, au cours de la première période dynastique en Égypte, devinrent plus élaborées et plus complexes dans leur conception. Ces premières tombes oblongues (les mastabas) continuèrent à être construites en briques crues, mais déjà à cette époque, les gens travaillaient la pierre pour créer des temples pour leurs dieux. Les monuments en pierre (les stèles) commencèrent à apparaître, en même temps que ces temples, à partir de la deuxième dynastie d'Égypte (vers 2890 – vers 2670 av. JC).
Les obélisques, de grands monuments de pierre verticaux à quatre côtés et au sommet effilé, commencèrent à apparaître dans la ville d'Héliopolis à peu près à cette époque. L'obélisque égyptien (connu par les Égyptiens sous le nom de tekhenu, « obélisque » étant le nom grec) est l'un des exemples les plus parfaits de l'architecture égyptienne reflétant la relation entre les dieux et le peuple, car ils étaient toujours construits par deux et on pensait que les deux créés sur terre étaient reflétés par deux pièces identiques érigées dans les cieux au même moment. L'extraction, la sculpture, le transport et l'érection des obélisques exigeaient des compétences et un travail considérables et ils permirent aux Égyptiens d'apprendre à travailler la pierre et à déplacer des objets extrêmement lourds sur plusieurs kilomètres. La maîtrise du travail de la pierre prépara le terrain pour le prochain grand bond en avant de l'architecture égyptienne: la pyramide.
Complexe de la pyramide à degrés à Saqqarah
Le complexe funéraire de Djéser à Saqqarah fut conçu par son vizir et architecte en chef Imhotep (vers 2667 – vers 2600 av. JC), qui imagina un grand tombeau construit en pierre pour son roi. La pyramide de Djéser n'est pas une «vraie pyramide» mais une série de mastabas empilés, connue sous le nom de «pyramide à degrés». Malgré cela, il s'agit d'un exploit incroyablement impressionnant qui n'avait jamais été réalisé auparavant. L'historien Desmond Stewart commente ce fait:
La pyramide à degrés de Djéser à Saqqarah marque l'un de ces développements qui, après coup, semblent inévitables mais qui auraient été impossibles sans un génie expérimentateur. Nous savons que le conseiller royal Imhotep était un tel génie, non pas grâce à la légende grecque, qui l'identifiait à Esculape, le dieu de la médecine, mais grâce à ce que les archéologues ont découvert d’après son impressionnante pyramide. Les recherches ont montré qu'à chaque étape, il était prêt à expérimenter de nouvelles voies. Sa première innovation fut de construire un mastaba non pas oblong, mais carré. La seconde concerne le matériau de construction (cité par Nardo, 125).
La construction de temples, bien qu'à un niveau modeste, avait déjà familiarisé les Égyptiens avec le travail de la pierre. Imhotep imagina la même chose à grande échelle. Les premiers mastabas avaient été décorés d'inscriptions et de gravures de roseaux, de fleurs et d'autres images de la nature; Imhotep voulait poursuivre cette tradition dans un matériau plus durable. Sa grande et imposante pyramide aurait les mêmes touches délicates et le même symbolisme que les mastabas plus modestes qui l'avaient précédée et, mieux encore, ces décorations seraient toutes travaillées dans la pierre au lieu de la boue séchée. C'est ce que commente l'historien Mark van de Mieroop :Imhotep reproduisit en pierre ce qui avait été précédemment construit en d'autres matériaux. La façade du mur d'enceinte possédait les mêmes niches que les tombes en terre crue, les colonnes ressemblaient à des fagots de roseaux et de papyrus, et des cylindres de pierre supportant les linteaux des portes représentaient des écrans de roseaux enroulés. Il y eut beaucoup d'expérimentation, ce qui est particulièrement évident dans la construction de la pyramide au centre du complexe. Elle eut plusieurs plans avec des formes de mastaba avant de devenir la première pyramide à degrés de l'histoire, empilant six niveaux en forme de mastaba les uns sur les autres... Le poids de l'énorme masse était un défi pour les bâtisseurs, qui placèrent les pierres selon une inclinaison vers l'intérieur afin d'éviter que le monument ne s’effondre (56).
Détail, Pyramide à degrés de Djoser
Detail, Step Pyramid of Djoser
Une fois achevée, la pyramide à degrés s'élevait à 62 mètres de haut et c’était la structure la plus haute de son époque. Le complexe environnant comprenait un temple, des cours, des sanctuaires et des quartiers d'habitation pour les prêtres. Il couvrait une superficie de 16 hectares et il était entouré d'un mur de 10,5 mètres de haut. Le mur était percé de 13 fausses portes et d'une seule vraie entrée dans l'angle sud-est ; l'ensemble du mur était ensuite entouré d'une tranchée de 750 mètres de long et de 40 mètres de large. La tombe de Djéser était située sous la pyramide, au fond d'un conduit de 28 mètres de long. La chambre funéraire elle-même était encastrée dans du granit mais, pour l'atteindre, il fallait traverser un dédale de couloirs, tous peints de manière lumineuse avec des reliefs et des carreaux incrustés, menant à d'autres pièces ou à des impasses remplies de récipients en pierre portant les noms des rois précédents. Ce labyrinthe fut créé, bien sûr, pour protéger la tombe et les objets funéraires du roi mais, malheureusement, il ne réussit pas à stopper les anciens pilleurs de tombes et la sépulture fut dévalisée durant l'Antiquité.
La pyramide à degrés de Djéser intègre tous les éléments les plus marquants de l'architecture égyptienne: symétrie, équilibre et grandeur, qui reflètent les valeurs fondamentales de la culture. La civilisation égyptienne était fondée sur le concept de Maât (harmonie, équilibre), décrété par les dieux. L'architecture de l'Égypte ancienne, que ce soit à petite ou à grande échelle, a toujours représenté ces idéaux. Les palais étaient même construits avec deux entrées, deux salles de trône, deux salles de réception afin de maintenir la symétrie et l'équilibre en représentant à la fois la Haute et la Basse-Égypte.
L'Ancien Empire et les pyramides
Les innovations d'Imhotep furent poursuivies par les rois de la 4e dynastie de l'Ancien Empire. On a longtemps pensé que le dernier roi de la troisième dynastie égyptienne, Houni (vers 2630 - 2613 av. JC), avait lancé les projets de construction massive de l'Ancien Empire en construisant la pyramide de Meïdoum, mais cet honneur revient au premier roi de la quatrième dynastie, Snéfrou (vers 2613 - 2589 av. JC). L'égyptologue Barbara Watterson écrit : « Snéfrou initia l'âge d'or de l'Ancien Empire, ses réalisations les plus remarquables étant les deux pyramides construites pour lui à Dahchour » (50-51). Snéfrou commença son travail avec la pyramide de Meïdoum, aujourd'hui appelée «pyramide effondrée» ou, localement, "fausse pyramide" en raison de sa forme: elle ressemble plus à une tour qu'à une pyramide et son enveloppe extérieure repose autour d'elle dans un gigantesque tas de gravier.
Pyramide de MeÏdoum
La pyramide de Meïdoum est la première vraie pyramide construite en Égypte. Une «vraie pyramide» est définie comme un monument parfaitement symétrique dont les crans furent remplis pour créer des côtés continus s'effilant vers un point au sommet. À l'origine, toute pyramide était une pyramide à degrés. La pyramide de Meïdoum cependant ne dura pas, car des modifications furent apportées à la conception originale de la pyramide d'Imhotep, de sorte que l'enveloppe extérieure reposait sur une fondation de sable plutôt qu’une fondation de roche, ce qui provoqua son effondrement. Les spécialistes sont divisés sur la question de savoir si l'effondrement se produisit pendant la construction ou sur une période plus longue.
Les expériences de Snéfrou avec la forme de pyramide en pierre ont bien servi son successeur. Khéops (ou Khoufou) (2589 - 2566 av. JC) tira les leçons des expériences de son père et ordonna à son administration de construire la Grande Pyramide de Gizeh, la dernière des sept merveilles du monde antique. Contrairement à la croyance populaire selon laquelle son monument fut construit par des esclaves hébreux, les ouvriers égyptiens de la Grande Pyramide étaient bien soignés et ils accomplissaient leurs tâches dans le cadre d'un service communautaire, en tant que travailleurs rémunérés, ou pendant la période où la crue du Nil rendait l'agriculture impossible. Les chercheurs Bob Brier et Hoyt Hobbs notent :
Sans les deux mois annuels pendant lesquels les eaux du Nil recouvrent les terres agricoles de l'Égypte, immobilisant pratiquement toute la main-d'œuvre, aucune de ces constructions n'aurait été possible. Pendant ces périodes, un pharaon offrait de la nourriture contre du travail et la promesse d'un traitement de faveur dans l'au-delà où il régnerait comme il le faisait dans ce monde. Pendant deux mois chaque année, des ouvriers se rassemblaient par dizaines de milliers venant de tout le pays pour transporter les blocs qu'une équipe permanente avait extraits pendant le reste de l'année. Les superviseurs organisaient les hommes en équipes pour transporter les pierres sur des traîneaux, des dispositifs mieux adaptés que des véhicules à roues pour déplacer des objets lourds sur du sable mouvant. Une chaussée, lubrifiée par l'eau, adoucissait la montée des pierres. Aucun mortier ne fut utilisé pour maintenir les blocs en place, un ajustement précis suffit pour que ces structures imposantes survivent pendant 4 000 ans - les seules merveilles du monde antique encore debout aujourd'hui (17-18).
Il n'existe aucune preuve que des esclaves hébreux, ou toute autre forme de travail forcé, aient été utilisés pour la construction des pyramides de Gizeh, de la ville de Pi-Ramsès ou de tout autre site important en Égypte. La pratique de l'esclavage existait certainement en Égypte tout au long de son histoire, comme dans toutes les cultures anciennes, mais il ne s'agissait pas du type d'esclavage populairement dépeint dans les histoires et les films basés sur le livre biblique de l'Exode. Dans le monde antique, les esclaves pouvaient être des tuteurs et des enseignants pour les jeunes, des comptables, des infirmières, des professeurs de danse, des brasseurs, voire des philosophes. En Égypte, les esclaves étaient soit des captifs des campagnes militaires, soit des personnes qui ne pouvaient pas payer leurs dettes et ces personnes travaillaient généralement dans les mines et les carrières.
Les Pyramides
https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11685/architecture-egyptienne-ancienne/