SPORT  EN  ALGÉRIE : LE  FOOT  CACHE  MISÈRE


SPORT  EN  ALGÉRIE : LE  FOOT  CACHE  MISÈRE Foot


Si l’on s’en tient aux fureurs des ultra nationalistes marocains générées par le fait que Miss Maroc ait fait allusion à ses origines algériennes, on peut supposer que le match de football qui opposera les équipes algérienne et marocaine ce samedi dans le cadre de la « Coupe arabe » sera l’occasion de remettre une pièce dans la machine déjà ronflante des invectives. Et ceci indépendamment du résultat et des conditions dans lesquelles se déroulera la rencontre.
Dans cet affrontement verbal, Alger qui a annoncé ce 8 décembre le boycott de la Coupe d’Afrique des Nations de handball prévue au Maroc du 13 au 23 janvier 2022, semble avoir pris une longueur d’avance. En effet, la Confédération africaine de handball, la CAHB, a décidé ce jeudi 9 décembre le report de la compétition sénior messieurs de cette discipline. Pourquoi l’Algérie pousse à la surenchère sur le terrain sportif ?
Les causes de cette polémique annoncée sont à la fois récentes et anciennes. Il y a évidemment la volonté du pouvoir algérien de ne pas laisser baisser la surchauffe sur sa frontalière occidentale dans une période de difficultés intérieures et extérieures multiples, complexes et, pour certaines, comme l’inflation et les pénuries, immédiates. Mais le plus important pour Alger est de souffler sur les braises pour camoufler un bilan sportif que les succès en trompe l’œil de Fennecs à la fois choyés et tenus en suspicion peinent à occulter.
Une première remarque. Comme pour plusieurs autres secteurs d’activité en Algérie, le sport a largement entamé sa descente aux enfers. Il est bien loin le temps où, à côté des Madjer, Fergani et autres Cerbah les Boulmerka, Morsli ou, bien avant eux, les handballeurs menés par Lamdjadani faisaient résonner l’hymne algérien sur d’autres podiums que ceux du sport roi. Lors des derniers jeux olympiques, on a vu un jeune nageur tunisien remporter une médaille d’or et des Marocains s’imposer sur les courses de fond où ils perpétuent une tradition consacrée depuis plusieurs décennies. L’Algérie, pour sa part, s’est distinguée par le retrait de l’un de ses judokas qui devait affronter au tour suivant un Israélien. Il y a belle lurette qu’en dehors du football, les exploits algériens se comptent sur les doigts d’une main. 
Pour l’Algérie officielle, le sport est réduit à cette équipe nationale essentiellement constituée de joueurs algéro-français. C’est à dire des recrues qui n’ont pas été formées dans le pays et qui n’y vivent pas. Pour autant, ce groupe, tel un magicien opérant le temps d’un spectacle parvient à charmer son monde. Resté sur une impressionnante série de matchs sans défaites, le team algérien est l’objet de toutes les sollicitudes des officiels et, au grand dam d’un sélectionneur qui n’en peut mais, le chef de l’Etat lui même vient régulièrement s’étancher de ses succès. L’entraineur qui tente tant bien que mal de tenir à l’écart cette étouffante proximité sait qu’elle risque à tout moment de l’aspirer dans sa décrépitude. Ce mariage imposé menace d’exploser à la première déconvenue de la miraculeuse équipe algérienne qui vole de succès en succès au moment où le pays sombre dans un régression généralisée.
En effet, les installations sportives sont à l’abandon, à commencer par les pelouses des stades de foot que l’on n’arrive ni à entretenir ni à rénover. Le championnat algérien est gangréné par la corruption et son niveau global est à la mesure des piètres résultats enregistrés par l’éducation, l’industrie, l’agriculture ou le tourisme. Les intrusions politiciennes relèvent d’une stratégie de manipulation qui fait et défait les clubs au gré des tensions claniques du sérail et de douteux agendas électoraux. Le putsch ubuesque qu’a connu la Jeunesse sportive de Kabylie en est la plus emblématique mais pas la seule manifestation. 
D’une façon plus générale, les jeunes regardent volontiers vers les criques d’où partent les felouques dont certaines finiront avec leur chargement de désespoir et de colère au fond de la Méditerranée au lieu de l’enceinte du 5 juillet qui ne compte plus le nombre d’années où elle n’a pas abrité une compétition.


SPORT  EN  ALGÉRIE : LE  FOOT  CACHE  MISÈRE Foot


Que l’on observe la situation objective du sport, football compris, avec la quantité et la qualité de ses infrastructures, son palmarès général, le nombre de licenciés…ou que l’on analyse son manque de production d’image attractive pour la jeunesse, le sport algérien est aujourd’hui un produit en voie de péremption. Le pouvoir politique a tort de s’approprier les mérites d’un collectif formé et vivant ailleurs pour espérer masquer des échecs et des abus de moins en mois supportables.
Faire dépendre la respectabilité d’une équipe dirigeante d’un pays comme l’Algérie du pied gauche de Mahrez est, quelles qu’en soient les vertus, un pari risqué.
Il est bien évident que le régime d’Alger n’est pas le seul à spéculer sur une discipline sportive pour atténuer des tensions sociales latentes ou adoucir un profil abîmé par des pratiques peu recommandables. La manipulation du sport est aussi vieille que les jeux olympiques. Mais dans les systèmes politiques les moins violents, on a pu voir à côté de ce détournement de notoriété sportive, des réussites économiques, des succès diplomatiques ou des productions artistiques venir suppléer le déficit de crédibilité ou de légitimité des responsables. Faire dépendre la respectabilité d’une équipe dirigeante d’un pays comme l’Algérie du pied gauche de Mahrez est, quelles qu’en soient les vertus, un pari risqué.
Il est arrivé que le sport amorce des mouvements géopolitiques majeurs. C’est une balle de pingpong qui a servi de première connexion à deux nations irréconciliables : la Chine et les Etats-Unis en l’occurrence.  Si l’on devait ne retenir que ce que répètent et écrivent les porte-voix et autres porte-plumes du pouvoir algérien, on peut avoir quelques doutes sur la volonté de ce dernier à impliquer son équipe de football prête à l’emploi dans une mission de paix.
Combien de temps peut durer encore la magie d’une prestidigitation binationale que l’on condamne sans appel dans la constitution et que l’on encense dans les tribunes populistes ?










 

https://www.adn-med.com/2021/12/08/sport-en-algerie-le-foot-cache-misere/