Cela s’est passé un 5 janvier 1948, création du Comité de libération du Maghreb arabe
Dans les années 1940, les militants maghrébins comprennent qu’une union entre les trois pays serait fort utile pour déloger l’occupant français. Le Comité de libération du Maghreb arabe raisonne un peu comme l’ancêtre de l’Union du Maghreb Arabe, mais ses objectifs sont avant tout l’indépendance des trois pays.
De nombreux nationalistes de l’Afrique du nord se sont connus dans la capitale française, au sein de l’Etoile nord-africaine. Mais dès le milieu des années 1930, l’idéologie unitaire de ce mouvement commence à fléchir pour privilégier la dimension nationale.
De là, les exilés maghrébins seront attirés par la Ligue arabe. Parmi les plus connus d’entre eux : Khider, Ben Bella, Ait Ahmed pour l’Algérie ; Salah Ben Youssef, Tayeb Slim, Rachid Driss, Brahim Tobal, pour la Tunisie et, pour le Maroc, l’émir Abdelkrim, Allal El Fassi, Ben Mellih, Majid Bengelloun.
Ils perçoivent rapidement l’intérêt d’un regroupement pour mieux se battre face à la France, tout en étant conscients des difficultés. S’il ne serait pas aussi facile d’obtenir leurs indépendances, les trois pays peuvent au moins s’unir pour attirer l’attention de l’opinion internationale sur la situation qui prévaut dans cette région.
Dans un article consacré à la crise de 1956 en Algérie, l’historien Daho Djerbal fait un flash-back pour expliquer le rôle de l’Egypte à cette époque. Babzman vous livre un extrait de cet article, partie intitulée :
« Le Caire comme plaque tournante de l’option radicale pour la libération du Maghreb »
Il est un fait que, dès avant le déclenchement de la lutte armée en Algérie, des liens politiques étaient entretenus entre les directions des mouvements nationaux indépendantistes du Maghreb et l’Egypte.
Après la deuxième guerre mondiale, les nationalistes marocains, algériens et tunisiens se retrouvent au Caire où se tient le 1er congrès du Maghreb arabe (15 au 22 février 1947). En même temps que le P.P.A. (Parti du peuple algérien) pour l’Algérie et le Néo-Destour pour la Tunisie, la Ligue de Défense y représente les nationalistes marocains. De cette rencontre naît le Bureau du Maghreb arabe dont la mission sera de coordonner l’action politique des différents partis nationalistes maghrébins. La ligne radicale du recours à la lutte armée l’emporte dans la capitale égyptienne au point qu’une année plus tard, en janvier 1948, un « Comité de libération du Maghreb arabe » est créé sous l’égide de l’Emir Abd el Krim el Khattabi. La question centrale devient alors celle de la coordination des différents partis nationalistes du Maghreb pour un déclenchement concerté de la lutte armée sur l’ensemble de l’Afrique du Nord. Une Charte d’union des commandos nord-africains aurait même été signée le 29 mai 1954 au Caire faisant suite à un autre accord secret conclu en 1951 entre les représentants de l’Istiqlal, du Né-Destour et ceux du M.T.L.D.7. Dans l’ensemble, la position particulièrement critique de l’Emir Abd el Krim quant à la modération des élites politiques du Maghreb et l’option de recours à la lutte armée qu’il préconise semble avoir des effets à l’intérieur même des organisations indépendantistes de cette région. Il est question de la création en 1948 de la Commission de libération du Maghreb et de la présence au Caire de la majorité des leaders politiques maghrébins ou de leurs représentants. Devant le refus de la plupart d’entre eux d’envisager la lutte armée, l’Emir Abd el Krim charge un petit comité composé de cinq militaires et d’un homme politique d’élaborer un plan global en vue de créer une armée de libération du Maghreb sur les trois fronts, Maroc, Algérie, Tunisie (El Hachemi Taud, in L’Armée de Libération du Maghreb 2004, p.13 sq).
À l’idéal d’une unité du Maghreb fondée sur une alliance politique des partis Istiqlal, M.T.L.D. et Néo-Destour, se substitue sur le terrain une autre unité maghrébine reposant sur la conjonction des armées de libération des trois pays du Maghreb : ALM (Maroc), ALN (Algérie), ALT (Tunisie).
Face à la solution politique négociée prévoyant une indépendance par étapes d’un Maghreb tourné vers l’Occident, se dresse alors l’alternative d’une indépendance conquise par les armes avec pour objectif, l’édification d’un Maghreb arabe intimement lié au Machrek.
En 1951, une autre conjonction s’établit lorsque, pour les soustraire aux arrestations, la direction du M.T.L.D algérien envoie les responsables de l’O.S. (Organisation spéciale) au Caire où ils constituent une délégation extérieure du parti8. On y retrouve Aït Ahmed, Mohammed Khider et Ahmed Ben Bella.
Ainsi, les représentants de la voie insurrectionnelle vont vivre des années cruciales dans la proximité immédiate du Comité de libération du Maghreb arabe. C’est là que, par l’intermédiaire d’Ahmed Ben Bella en particulier, s’établissent des alliances et se met en place un axe Maghreb-Machrek dont le pivot semble se trouver dans la capitale égyptienne.
En Algérie, l’impasse dans laquelle se trouve engagée la voie électorale et pacifique de la majorité du comité central du M.T.L.D. précipite la crise. D’autres responsables de l’O.S. dont Mohammed Boudiaf et Mourad Didouche tentent par tous les moyens de rassembler leurs troupes et, faute de faire l’unité des rangs entre partisans de Messali Hadj (Président du parti) et ceux du comité central du MTLD, ils passent à la phase active de l’insurrection le 1er novembre 1954.
6 Voir tout ce qui touche à l’histoire de l’Etoile Nord-Africaine, ancêtre et creuset du nationalisme indépendantiste, et ses relations avec la IIIe internationale.
7 Slimane Chikh L’Algérie en armes ou le temps des certitudes. O.P.U., Alger 1981, p. 486 et suiv.
8 Une autre Délégation extérieure du MTLD existait à Paris.
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