Cette planète se rapproche dangereusement de son étoile mourante
Ce pourrait être un aperçu de ce qui arrivera prochainement à la Terre. Alors que son étoile hôte se meurt, une exoplanète s'en rapproche dangereusement, un phénomène nommé déclin orbital. A ce rythme, une collision se produira dans moins de trois millions d'années, qui mènera à la destruction de la planète.
Interview : les exoplanètes sont-elles habitées ? Il pourrait y avoir au moins 100 milliards de planètes simplement dans notre galaxie. Difficile d’imaginer qu’aucune ne puisse abriter la vie. Le Cnes a interviewé Michel Viso, responsable des programmes d’exobiologie, afin qu’il nous parle des conditions d'apparition de la vie dans l'univers.
L'action se déroule à quelque 2 629 années-lumière d'ici. Une étoile, nommée Kepler-1658, a épuisé son carburant pour les fusions nucléaires, et est devenue une étoile mourante. Découverte en 2009 par le télescope spatial Kepler, elle a continué d'être étudiée depuis, si bien que la découverte de son exoplanète a été annoncée en 2019 ! Et cette dernière, une « Jupiter chaude » nommée Kepler-1658b, semble se rapprocher petit à petit de son étoile. C'est ce qu'ont découvert des scientifiques, et rapporté dans une étude de la revue The Astrophysical Journal Letters.
Avec une masse 5,9 fois plus élevée que celle de notre Jupiter, Kepler-1658b orbite très proche de son étoile hôte. Elle effectue un tour complet de Kepler-1658 en seulement 3,85 jours et se trouve huit fois plus proche de son étoile que Mercure du Soleil, d'où ce surnom de « Jupiter chaude » ! Et si elle se rapproche toujours au même rythme de son étoile, elle entrera en collision avec elle dans moins de trois millions d'années.
La planète Kepler-1658b a été la toute première exoplanète découverte par le satellite spatial Kepler. Ici, une vue d'artiste de l'étoile et sa planète, une Jupiter chaude. Gabriel Perez Diaz, Instituto de Astrofísica de Canarias
Les forces de marée rapprochent Kepler-1658b de son étoile
Ce rapprochement de Kepler-1658b vers son étoile se nomme « déclin orbital ». Le phénomène a aussi été observé entre Neptune et sa lune Io, ou encore entre Mars et sa lune Phobos. Il peut avoir plusieurs causes, mais dans l'étude, il est principalement question d'effets de marée. Lorsque deux corps orbitent autour d'un centre de gravité commun, comme dans ces systèmes planétaires, ils exercent une force gravitationnelle l'un sur l'autre. La force exercée sera cependant plus intense au niveau des parties les plus proches de centre de gravité, et moins au niveau des endroits plus éloignés.
Mais les forces de marée, seules, ne suffiraient pas à modifier l'orbite de Kepler-1658b, sinon le même phénomène s'appliquerait à tous les systèmes similaires ! C'est ensuite le sens de rotation des deux astres qui définit les conséquences du phénomène. Dans le cas du système Terre-Lune, elles imposent une rotation synchrone : la Lune est verrouillée par les effets de marée, et effectue dans le même temps un tour autour de la Terre et un tour sur elle-même. Si bien qu'elle nous montre toujours la même face !
Le verrouillage des marées entraîne la rotation de la Lune autour de son axe à peu près dans le même temps qu'il lui faut pour orbiter autour de la Terre (animation de gauche). Si la Lune ne tournait pas du tout sur elle-même, elle montrerait alternativement sa face proche et sa face éloignée de la Terre (animation de droite). Stigmatella aurantiaca, Wikimedia Commons
Dans le cas de Kepler-1658b, son mouvement est rétrograde : la planète tourne dans le sens contraire de celui de son étoile. Et c'est ce qui cause le rapprochement observé par les chercheurs ! Ou du moins en partie. Car l'étoile Kepler-1658 se révèle, elle aussi, inhabituelle ! Avec 1,45 masse solaire mais un diamètre presque trois fois plus élevé que celui du Soleil, l'étoile se trouve actuellement dans le stade de « sous-géante » : après avoir consommé tout son carburant, le cœur de l'étoile se contracte, et les réactions de fusion nucléaire s'enclenchent dans une couche un peu plus externe. En résulte un gonflement de l'étoile, d'où le diamètre de trois fois celui du Soleil !
Dans cette animation, le satellite orange décrit un mouvement rétrograde autour de sa planète, contrairement aux trois autres. Silver Spoon, Wikimedia Commons
Un aperçu de ce qui nous attend, dans 5 milliards d'années
En scrutant l'étoile Kepler-1658 et sa planète grâce à la méthode des transits durant près de 13 ans, les chercheurs ont constaté une diminution de son temps d'orbite de 131 millisecondes par an, une première autour de ce type d'étoile ! « Nous avons déjà détecté des preuves d'exoplanètes aspirées vers leurs étoiles, mais nous n'avons jamais vu une telle planète autour d'une étoile évoluée », a déclaré Shreyas Vissapragada dans un communiqué, premier auteur de l'étude et astrophysicien au Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics. « La théorie prédit que les étoiles évoluées sont très efficaces pour extraire l'énergie des orbites de leurs planètes, et maintenant nous pouvons tester ces théories avec des observations. »
L'occasion d'en apprendre plus sur cette étoile et le phénomène. Car c'est le même destin qui attend notre Planète, lorsque le Soleil passera au stade de sous-géante, puis de géante rouge. Mais pas de panique, ce phénomène ne se produira pas avant 5 milliards d'années, le Soleil n'en étant qu'à la moitié de sa vie ! « Maintenant que nous avons des preuves de l'aspiration d'une planète autour d'une étoile évoluée, nous pouvons vraiment commencer à affiner nos modèles de physique des marées », s'est enthousiasmé S. Vissapragada. « Le système Kepler-1658 peut servir de laboratoire céleste de cette manière pour les années à venir, et avec un peu de chance, il y aura bientôt beaucoup plus de ces laboratoires. »
Source : sites Internet