L’avant dernière bataille de Baba Merzoug
Nous sommes en juillet 1775, le roi d’Espagne, Charles II, décida de mener une expédition de grande envergure ci=ontre El Djazair avec la bénédiction de l’Eglise et l’appui de son cousin Louis XVI de Bourbon, des dirigeants des pays riverains et surtout les conseils de son premier ministre, Grimaldi.
Charles III prétendait réussir là ou ses ancêtres, Charles Quint (tentative de 1541) et Philippe II (1558), échouèrent pour finir, comme on le sait, par un désastre retentissant. Il choisira pour cette offensive l’amiral Alexander O’Reilly, un irlandais au service de l’Espagne, à la tete de 400 navires et 25000 fantassins.
Avant d’aller plus loin une remarque s’impose : quand il s’agit d’étranger au service de l’Espagne, recrutés pour les besoins des expéditions menées contre El Djazair, les chroniqueurs et autres historiens restent muets à se sujet. En revanche, lorsqu’il s’agit d’étrangers convertis à l’islam au service de la Marine d’El Djazair, tous les qualificatifs leur sont donnés : renégats, mercenaires, infidèles…
L’armada de O’Reilly s’approcha d’Alger le 1er Juillet 1775, vite signalée par le chef du Bordj El Mourakabade Sidi Bennour (poste d’observation dominant la mer installé au point culminant d’Alger à Sidi Bennour, vers Bouzaréah). Le messager envoyé auprès du dey, Mohamed Ben Othman, indiquait qu’une forêt de navires était en vue d’El Djazair. Le dey Mohamed Ben Othman était un homme très compétent et estimé par la population d’Alger, s’attelant à redressé la situation financière durement affectée par les guerres antérieures et la sécheresse qui sévissait depuis près de trois années, situation laissée par son prédécesseur, Baba Ali Nekcis, mort le 2 février 1766.
Certaines sources affirme que le dey Mohamed Ben Othman était très sévère mais aussi affable qu’indulgent, intègre et soucieux du bien-être de son peuple pour lequel il effectuait des dépenses personnelles pour construire des routes, des fontaines, des centres de soins, etc. Il déclara la guerre à tous les états qui ne voulaient pas s’acquitter des indemnités coutumières pour l’obtention de la liberté de navigation en Méditerranée comme Venise, la Hollande la Suède et enfin le Danemark qui tenta bien une expédition sur El Djazair, dirigée par l’amiral Katz, sans succès, obligeant le Danemark à signer un traité de paix en 1772.
Les préparatifs de cette expédition n’étaient pas ignorés par Mohamed Ben Othman grâce aux informateurs andalous restés en Espagne. De ce fait la mobilisation avait été décrétée dès la troisième semaine de Juin soit une semaine avant le départ de O’Reilly vers Alger.
Ces forces évaluées à 18 000 hommes furent positionnées au Hamma, Oued Kniss et à El Harrache sous les ordres de Hassan El Kheznadji (fils du dey). Quant à celles commandées par Salah Bey de Constantine, Mustapha Khodja et le Bey du Titteri, elles ont été réparties entre Tamenfoust et El Hamiz. Ce dernier choix s’est avéré judicieux car O’Reilly, parfaitement au courant de la présence de Baba Merzoug, fera débarquer une grande partie des ses troupes du côté du Hamiz, tout en tentant une incursion du côté d’El Harrache. Une dizaine de navires ennemis furent touchés par les boulet de Baba Merzoug et coulèrent dans la baie, non loin de Tamenfoust. Des combats acharnés se déroulèrent sur les rives de oued El Hamiz, d’El Harrache et des Sablettes.
Au cours de cette bataille se distingua Salah Bey de Constantine tant par sa bravoure que par la ruse qu’il employa contre les fantassins espagnols, ruse unique au XVIIIème siècle, inspirée sans doute des méthodes de Hannibal et ses éléphants quelques siècles auparavant.
En effet, Salah Bey lança contre les fantassins espagnols une formation à dos de chameau, semant la panique dans leur rang, à la vue des ces animaux pratiquement inconnus pour beaucoup d’entre eux. Désemparés les espagnols battirent en retraite sur ordre de O’Reilly, abandonnant sur le champs de bataille des centaines de morts et de blessés abandonnés sur les rives d’El Harrache.
Cette éclatante victoire donna encore une fois la preuve qu’Alger demeurait inexpugnable méritant son surnom d’El Mahroussa forçant le respect et l’admiration de l’Angleterre et même de l’Amérique. Le trône de Charles III vacilla et le comte Grimaldi finira ses jours au Vatican, dépité et confus.
Belkacem Babaci.
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