Amazighs et organisations civiles pour Benmoussa : « Priver les membres de la communauté amazighe est une démarche délibérée qui traduit une discrimination raciale.
Amazighs et organisations civiles pour Benmoussa : « Priver les membres de la communauté amazighe est une démarche délibérée qui traduit une discrimination raciale. 1-3
Dans une lettre adressée au ministre de l'Éducation nationale, de l'Éducation préliminaire et des Sports, Chakib Benmoussa, un certain nombre d'associations amazighes et civiles au Maroc et en Europe se sont interrogées sur les raisons de l'exclusion de l'enseignement de la langue officielle amazighe aux enfants des citoyens et citoyennes marocains résidant à l'étranger.
La lettre des organisations amazighes et civiles indique que le ministère de la tutelle a adressé une « note aux académies régionales concernant le concours de sélection des enseignants du primaire qui enseigneront la langue arabe et la culture marocaine aux membres de la communauté marocaine résidant en Europe, en dont il a précisé le nombre de postes contestés en 218 postes, dont 139 seront nommés en France, 60 en Espagne 16 en Belgique et 3 en Allemagne.
Elle a également indiqué qu'"un autre mémorandum a été diffusé afin de fournir 26 professeurs pour enseigner l'arabe pour les missions d'enseignement à l'étranger, à raison de 17 pour les missions françaises, 6 pour l'espagnol et 3 pour les belges".
Nous attirons votre attention, ajoute le texte de la lettre, que « ce que vous avez fait est une démarche délibérée qui dénote une discrimination raciale contraire à l'esprit de la Constitution du 1er juillet 2011 et au contenu de son article 5, et aux objectifs de l'Organisme Loi n°16-26 relative à la définition des étapes d'activation de l'officialisation de l'amazigh et des modalités de son incorporation dans le domaine de l'Education et dans les domaines prioritaires de la vie publique.
Elle est aussi « en violation flagrante des articles 7 et 8 de la Convention internationale des droits de l'enfant et des recommandations émises par l'UNESCO (1) et la Banque mondiale (2) sur l'importance de la langue maternelle dans l'éducation des enfants. »
La même source a ajouté : « Nous attendions de vous, et de votre ministère, que vous donniez l'exemple quant à la priorité et l'urgence d'activer le caractère officiel de la langue amazighe dans le domaine de l'éducation nationale, en généralisant l'enseignement de la langue officielle amazighe, comme l'arabe, en commençant dès le préscolaire et en le généralisant à tous les niveaux primaire et secondaire, non seulement dans le respect du document constitutionnel mais surtout comme l'un des moyens les plus efficaces pour lutter contre la déperdition scolaire.
Voici le texte du message :
Son Excellence Monsieur Chakib Benmoussa
, Ministre de l'Education Nationale, de l'Enseignement Primaire et des Sports,
Royaume du Maroc Objet : Quelles sont les raisons d'exclure l'enseignement de la langue officielle amazighe aux enfants des citoyens marocains et des citoyens résidant à l'étranger ? Monsieur le Ministre,
Vous avez adressé une note aux académies régionales de votre ministère concernant le concours de sélection des professeurs de l'enseignement primaire qui enseigneront la langue arabe et la culture marocaine à la communauté marocaine résidant en Europe, dans laquelle vous avez précisé le nombre de postes en lice sur 218 postes, de dont 139 seront nommés en France, 60 en Espagne, 16 en Belgique et 3 en Allemagne.
Vous avez également fait circuler un autre mémorandum afin de fournir 26 professeurs pour enseigner l'arabe pour les missions d'enseignement à l'étranger, à raison de 17 pour les missions françaises, 6 pour l'espagnol et 3 pour la Belgique.
Nous attirons votre attention sur le fait que ce que vous avez entrepris est une démarche délibérée de discrimination raciale qui contredit l'esprit de la Constitution du 1er juillet 2011 et le contenu de l'article 5 de celle-ci, ainsi que les objectifs de la loi organique n°16-26 relatives à la détermination des étapes d'activation du caractère officiel de l'amazighité et des modalités de son inscription dans le domaine de l'éducation et dans les domaines pertinents de la vie publique. Sans oublier qu'il s'agit d'une violation flagrante des articles 7 et 8 de la Convention internationale des droits de l'enfant et des recommandations émises par l'UNESCO (1) et la Banque mondiale (2) sur l'importance de la langue maternelle dans l'éducation des enfants.
Nous attendions de vous, et de votre ministère, que vous donniez l'exemple quant à la priorité et l'urgence d'activer le caractère officiel de la langue amazighe dans le domaine de l'éducation nationale, en généralisant l'enseignement de la langue officielle amazighe, comme l'arabe, à partir de le stade préscolaire et de le généraliser à tous les niveaux primaire et secondaire, non seulement par respect pour le document constitutionnel, mais surtout comme l'un des moyens les plus efficaces de lutte contre la déperdition scolaire, comme vous l'avez déjà mentionné, qui, en raison de sa propagation, est devenue alarmante, avec environ 300 000 enfants quittant l'école chaque année !
Et maintenant, après avoir assumé la présidence de la Conférence des ministres de l'éducation des pays et gouvernements francophones (CONFEMEN), depuis sa 59e session, qui s'est tenue en février dernier à Rabat, sous le slogan « Langue maternelle et langue d'enseignement : toute stratégies pour faciliter les apprentissages initiaux, la réussite scolaire et le vivre ensemble au XXIe siècle », Rappelons, Monsieur le Ministre, ce qu’a confirmé de près le linguiste français Alain Bentollella, en novembre 2019 : « Les systèmes éducatifs de certains pays , aussi coûteux soient-ils, sont devenus des machines à engendrer l'analphabétisme et l'échec scolaire car ils ignorent absolument (ou ne veulent pas) résoudre le problème qui les hante lié au Choix dans la langue d'enseignement. Ils conduisent les élèves à de graves échecs parce que l'école les a reçus dans une langue que leurs mères ne leur ont pas enseignée, et pour l'enfant c'est une violence intolérable, alors qu'en adoptant sa langue maternelle on va lui donner accès à la lecture et à l'écriture et on peut puis construire une éducation ambitieuse en langues officielles sur des bases solides.
Vous avez exprimé vous-même, via Twitter, le succès retentissant de l'expérience marocaine exceptionnelle des écoles communales « Merdersat.Com » affiliées à la BMCE BANK OF AFRICA, que vous avez eu l'honneur de visiter à Bouskoura (Casablanca) et à Beni Ansar ( Nador) parce qu'ils adoptent la langue maternelle, comme la langue berbère, dans le programme scolaire. Par conséquent, nous vous demandons, Monsieur le Ministre, de nous dire ce qui vous empêche d'adopter cette expérience et de la généraliser aux écoles publiques et au profit des enfants des citoyens marocains vivant à l'étranger ?
Rappelons que le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a reconnu que le Royaume du Maroc pratique une politique de discrimination de fait à l'égard des Berbères dans le domaine de l'emploi et de l'éducation, selon le Comité du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels , en octobre 2015 (3), qui recommandait à l'État marocain « de prendre des mesures urgentes pour faire face aux problèmes de qualité de l'enseignement public, de déperdition scolaire et d'échec scolaire.
Le comité a recommandé que l'État marocain «développe un système et un programme éducatifs appropriés axés sur l'éducation préscolaire, l'éducation ou l'alphabétisation dans la langue maternelle, la formation professionnelle et le soutien aux enfants qui ont quitté l'école. Et redoubler d'efforts pour assurer un enseignement primaire, secondaire et universitaire en langue amazighe.
La Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, Mme E. Tendayi Achoumi, qui s'est rendue au Royaume du Maroc en décembre 2018, a noté que la discrimination contre les Berbères se poursuit en raison de leur langue et de leur culture. En conséquence, elle a également renouvelé cette recommandation exceptionnelle appelant le Royaume du Maroc à "intensifier ses efforts pour que les Berbères ne soient pas victimes de discrimination raciale dans l'exercice de leurs droits fondamentaux, notamment en matière d'éducation... . . (4)
Nous savons bien que les gouvernements précédents, dirigés par les islamistes du Parti de la justice et du développement, ont délibérément ignoré ces recommandations des Nations unies, mais pourquoi continuez-vous à suivre la même approche alors même que votre chef de gouvernement, Amghar Aziz Akhannouch, a rappelle que « la concrétisation de ce projet de société réside dans l'intégration des Amazighs dans tous les aspects de la vie publique et la mobilisation des moyens humains, logistiques et financiers pour assurer la mise en œuvre des exigences de la loi réglementaire relatives à l'activation du caractère officiel des la langue amazighe.
Pourquoi excluez-vous l'enseignement de la langue officielle amazighe aux enfants des Marocains résidant à l'étranger ?
Par ailleurs, alors que le Maroc accueillera la Septième Conférence internationale sur l'apprentissage des adultes CONFINTEA VII sous le thème "Apprentissage et éducation des adultes pour le développement durable : un programme transformateur", organisée avec l'UNESCO du 15 au 17 juin 2022 à Marrakech, nous sommes convaincus que l'alphabétisation des adultes dans leur langue maternelle, comme le recommande Paulo Freire, seront absents et ignorés des travaux de ce colloque. C'est une occasion en or que vous raterez si vous excluez de vos discussions l'importance des langues autochtones et maternelles, bien que la Directrice générale de l'UNESCO, Mme Audrey Azoulay, ait souligné que "l'éducation des adultes est la clé pour changer notre avenir". .
Monsieur le Ministre,
Si vous souhaitez que votre programme gouvernemental dans le domaine de l'éducation des enfants, qui est à la base de toute politique de développement humain, ici comme à l'étranger, ne soit pas voué à l'échec d'avance, et si vous souhaitez récolter des fruits et des résultats positifs et importants, il suffit alors de commencer immédiatement à intégrer la langue amazighe dans tous les programmes de l'éducation nationale, en les généralisant du préscolaire à l'université, en les intégrant dans les programmes éducatifs des Marocains résidant à l'étranger, et en introduisant l'alphabétisation des adultes. Vous réussirez inévitablement si vous prenez au sérieux les recommandations stratégiques de la « Décennie internationale des langues autochtones 2022-2032 », lancée par l'UNESCO et l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones.
Monsieur le Ministre,
Dans l'espoir que nos revendications seront prises au sérieux et que nous adopterons une politique volontariste contre cette discrimination raciale à l'égard de la langue officielle amazighe, veuillez accepter nos plus hautes expressions d'appréciation et de respect.


Remarques :
(1)- https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000380593
(2)- https://documents1.worldbank.org/curated/en/778161626203742899/pdf/Effective-Language-of-Instruction-Policies-for-Learning.pdf
(3)- https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=E/C.12/MAR/CO/4&Lang=Fr
(4)- https://amadalamazigh.press.ma/fr/lonu-demande-au-maroc-dintensifier-les-efforts-pour-que-les-amazighs-ne-soient-pas-victimes-de-discrimination-raciale/


Premières ONG-s et associations signataires :
1- Assemblée Mondiale Amazighe (AMA), Bruxelles (Belgique)
2- Association TIFAWIN, Bruxelles (Belgique)
3- Association TAMAZIGHT, Liège (Belgique)
4- Association TIWIZI59, Lille (France)
5- Association AMEZRUY, Lille (France)
6- Association ADRAR, Amsterdam (Pays-Bas)
7- Union des Associations Amazighes en Allemagne (Allemagne)
8- DAVID MONTGOMERY HART Fondation Méditerranéenne pour les Etudes Amazighes, Melilla (Espagne)
9- TAMETTUT Association des femmes amazighes pour la culture et le développement, Barcelone (Espagne)
10- Association Culturelle IMAZIGHEN, Melilla (Espagne)
11-Amazigh American Association (USA)
12- Association des Enseignants de la langue amazighe de la région de Casablanca-Settat, Casablanca (Maroc)
13-Association AJDIR pour l’apprentissage de la langue amazigh et la transmission de sa culture et de son patrimoine, Kénitra (Maroc)
14-Collectif « TAMEGHRABIT » des Convergences Citoyennes (TADA TAMEGHRABIT), Rabat (Maroc)
15-Confédération des Associations de Senhaja du Rif pour le Développement, Targuiste (Maroc)
16- Forum TOUBKAL pour la culture amazighe et les droits de l’homme, Marrakech (Maroc)
17- Réseau des Associations de Développement de la province d’Al-Hoceima, Al-Hoceima (Maroc).
18- Association AMOUD pour la Culture et l’Environnement, Casablanca (Maroc)
19- Association TAMASNA, Casablanca (Maroc)
20- Association ACHABAR d’Imouzzar Kandar (Maroc)
21- Association jeunesse de SEGANGAN pour la culture et le développement, Nador (Maroc)
22- Association ADGHAL du Rif pour le développement rural, Alhoceima (Maroc)



https://amadalamazigh.press.ma/%d8%aa%d9%86%d8%b8%d9%8a%d9%85%d8%a7%d8%aa-%d8%a3%d9%85%d8%a7%d8%b2%d9%8a%d8%ba%d9%8a%d8%a9-%d9%88%d9%85%d8%af%d9%86%d9%8a%d8%a9-%d9%84%d8%a8%d9%86%d9%85%d9%88%d8%b3%d9%89-%d8%ad%d8%b1%d9%85%d8%a7/